11/02/2024
Ce soir au Théâtre de Massueville, lors du concert classique Sous les chandelles, nous avons révélé La légende du cheval noir de Massueville. On vous invite à la partager à tous et à toutes, vous contribuerez à faire connaître ce magnifique village.
En 1841, dans le petit village de Massueville, le curé Pierre Lafrance entreprit un projet ambitieux : bâtir une église majestueuse qui deviendrait le cœur de la paroisse. Les villageois, animés d’une foi profonde, se mobilisèrent pour fournir chacun 25 voyages de pierres, contribuant ainsi à la construction. Cependant, malgré la bonne volonté des habitants, les travaux étaient lents et difficiles. Les pierres étaient lourdes, et les moyens modestes du village ne permettaient pas de faire appel à des ouvriers spécialisés.
Un jour, alors que le curé s’interrogeait sur la manière de faire avancer plus rapidement le chantier, un étranger fit son apparition. Vêtu d’un long manteau sombre et chevauchant un splendide cheval noir, l’homme se présenta sous le nom de Guillaume de la Roche, un voyageur qui avait entendu parler de la construction et souhaitait offrir son aide.
« Mon cheval est fort et infatigable, » dit-il au curé. « Il peut porter les pierres les plus lourdes et vous aidera à finir votre église en un rien de temps. Toutefois, il y a une seule condition : ne lui retirez jamais sa bride. Tant que vous respectez cela, tout se passera bien. »
Le curé Lafrance, bien que surpris, accepta l’offre. Le cheval de Guillaume se mit immédiatement à l’œuvre, transportant des pierres avec une force inégalée. Sous les yeux ébahis des ouvriers, il déplaçait des blocs qui auraient nécessité plusieurs hommes. En un mois, le chantier avait progressé de manière spectaculaire, et l’église prenait forme bien plus rapidement que prévu.
Cependant, au bout de quelques semaines, les ouvriers remarquèrent que le cheval semblait s’épuiser. Ses yeux autrefois vifs étaient devenus ternes, et il semblait peiner sous le poids des pierres. Malgré l’efficacité de l’animal, le curé s’inquiétait pour sa santé.
Un soir, alors que le chantier s’était vidé de ses travailleurs, Julien, un jeune ouvrier au cœur sensible, ne put s’empêcher de compatir à la douleur apparente de la bête. « Ce n’est qu’un cheval, après tout, » pensa-t-il. « Il mérite bien un peu de repos. » Ignorant la consigne de Guillaume, il s’approcha de l’animal et, d’un geste précautionneux, lui retira la bride.
Aussitôt, une transformation surprenante s’opéra. Le cheval se secoua, comme libéré d’un fardeau invisible, et se redressa fièrement. Ses yeux retrouvèrent leur éclat, et une énergie nouvelle semblait l’animer. Mais, au lieu de s’enfuir ou de s’effondrer, il se tourna vers Julien et inclina légèrement la tête, comme pour le remercier. Puis, contre toute attente, le cheval se mit à parler d’une voix douce mais puissante :
« Merci, jeune homme, de m’avoir libéré. Pendant des années, j’ai servi sans repos. Maintenant que je suis débridé, je suis libre de mes contraintes, mais je n’oublierai jamais votre bienveillance. En échange, je vais vous aider à terminer cette église. »
Julien, médusé, resta figé sur place, incapable de répondre. Le cheval, désormais libéré de son entrave, travailla avec encore plus d’ardeur les jours suivants, soulevant des charges encore plus lourdes et accélérant le chantier d’une manière que personne n’aurait pu imaginer. L’église fut achevée en un temps record, et Guillaume de la Roche, fidèle à sa parole, réapparut un jour pour reprendre son cheval.
« Vous avez respecté votre promesse, et je vous en remercie, » dit Guillaume en souriant. « Mais sachez que mon cheval, bien que désormais libre, veillera toujours sur cette église. »
Les années passèrent, et la légende du cheval noir devint une histoire que les anciens racontaient avec amusement aux jeunes générations. Cependant, en 1907, une tragédie frappa le village : un incendie ravagea l’église. Le feu dévora les bancs, les murs de bois et les décorations, mais étrangement, les pierres restèrent intactes, et les cloches, symbole de la foi du village, ne furent pas touchées. Certains affirmèrent avoir vu, dans la fumée des décombres, l’ombre d’un cheval noir qui veillait, fidèle à sa promesse.
Grâce à l’incroyable solidarité des habitants, l’église fut rapidement reconstruite, et depuis, elle continue de trôner au cœur de Massueville, accompagnée de cette histoire fantastique d’un cheval noir qui, autrefois, avait aidé à ériger ce lieu sacré. Les villageois aiment dire que, parfois, lors des nuits calmes, on peut encore entendre le galop d’un cheval dans le lointain, rappelant que certaines promesses, même les plus incroyables, ne sont jamais oubliées.