Cette pièce chorégraphique c'est d'abord une réflexion sur les comportements de plus en plus léthargiques que nous avons face aux technologies des communications.
Au départ, la recherche chorégraphique a facilité une meilleure définition de l'essence de l’œuvre. Ma recherche a principalement questionné l’état de corps léthargique provoqué par notre dépendance aux nouvelles technologies. Cet état qui nous paralyse et nous éloigne des vraies relations humaines. Le temps de recherche a permis d’approfondir cet état, ce qui a donné forme à un être léthargique qui n’existe pas dans la réalité, mais que le public associe rapidement à nos comportements aliénants face aux technologies.
Au cours du processus, il m'est apparu essentiel de matérialiser cette technologie de manière plus organique et viscérale. Je me suis concentrée sur l’essence même de la dépendance, comment elle arrive, quelle réaction suscite-t-elle dans le corps? C’est alors que la matière est arrivée, une poudre blanche qui s’apparente à un minerai et qui devient le point névralgique de la pièce, c’est de cette matière dont les êtres léthargiques développent leur dépendance, le début d’une réelle toxicomanie du virtuel. Ils s’engouffrent ainsi dans un désert personnel et social.
Ensuite, il y a eu la création des divinités qui ajoute une touche mystique à l’œuvre et représente le pouvoir des nouvelles technologies. Les divinités sont inspirées des divinités sumériennes et ont des allures de statues immuables et indestructibles. Leur force réside dans le contrôle de leur marche et de leurs tours ainsi que leurs gestuelles d’impact qui favorisent l’implication musculaire et l’intensité des danseurs de façon presque constante. Ce qui accentue d’ailleurs le contraste marqué avec les gestuelles plus vaporeuses et fluides des êtres léthargiques.
L’étape du contrôle de l’être léthargique est centrale, dès que l’être est en lien physique avec la divinité, elle le contrôle en recréant des références gestuelles aux nouvelles technologies telles que ; les jeux vidéos, le cellulaire, l’ordinateur et la tablette numérique. À travers ce rapport de force on perçoit leur puissance et leur pouvoir d’attraction.
C’était important pour moi de terminer sur une note positive afin de favoriser une prise de conscience du public, un retour à l’humanité s’imposait. C’est pourquoi l’être léthargique évolue vers le stade de l’humain ce qui note le désir de changement que je souhaite susciter chez le public. Le retour à l’être humain dans toute sa complexité et ses besoins essentiels d’affection et de contacts humains.
Le désir d’aller vers le public afin de provoquer un réel contact humain m’est apparu essentiel puisque je recherche une prise de conscience du public. Léthargie collective est un projet qui a une portée sociale importante puisqu’il favorise une prise de conscience collective et qui je l’espère provoque chez le public un changement au niveau de leurs habitudes de vie face aux nouvelles technologies ainsi qu’à leurs réels contacts humains.
Jolène Boily Béliveau
Chorégraphe