08/01/2023
PREMIERS CONTACTS ET TRAITE DES FOURRURES : PRÉMISSES À L’ALLIANCE FRANCO-AUTOCHTONE
Beaucoup d’histoires ont été racontées sur les premiers contacts entre les peuples autochtones d’Amérique du Nord et les Européens. Parmi elles, très peu forment un récit de paix et d’harmonie, mais plus on creuse, plus on réalise que quelque chose d’unique s’est passé en Nouvelle-France au cours du 17e siècle.
Jugés moins propices à l’enrichissement en raison des longs hivers et d’une courte saison de récolte, le golfe et l’estuaire du Saint-Laurent n’avaient pas initialement fait l’objet de réelles conquêtes territoriales par les pouvoirs européens. Depuis les cuisants échecs de Jacques Cartier et de Roberval en 1542-1543, il faudra d’ailleurs attendre plus d’un demi-siècle avant que la France ne tente à nouveau de s’installer de manière permanente dans cette région de l’Amérique du Nord.
Néanmoins, cela ne signifie pas qu’elle fut complètement délaissée durant cette période alors que depuis le début du 16e siècle, des pêcheurs et des baleiniers européens avaient pris l’habitude de venir profiter de l’abondance de ces eaux durant les saisons estivales. En 1580, ces activités commerciales n'occupaient pas moins de 1 200 hommes à bord de quelque 400 navires.
Les camps temporaires sur les berges des baies, où l’on séchait le poisson et l’on transformait le gras de baleine en huile, devinrent rapidement des lieux prisés de rencontres et d’échanges avec les Autochtones locaux. Ces derniers ne tardèrent pas à apprécier la force supérieure et le caractère tranchant des pointes de flèche en acier, des haches et des couteaux, tous utiles comme outils ou armes. Les chaudrons en cuivre permettaient quant à eux de cuisiner plus aisément et les bêchoirs de métal facilitaient le labeur pour cultiver maïs, fèves et courges.
Du côté européen, c’est la popularité des chapeaux de poils, vers la fin du 16e siècle, qui fit grimper la valeur des fourrures de castor notamment et incita les marchands français à s’intéresser davantage à ce commerce. Bientôt, des navires quittaient les ports du nord de la France avec pour seul but d’acquérir des pelleteries.
Ainsi, bien avant l’arrivée de Samuel de Champlain dans la vallée du Saint-Laurent au début du 17e siècle, un réseau complexe de relations d’échanges réciproques s’était déjà développé entre Européens et Autochtones. De ces interactions avaient même émergées des langues de contact improvisées qu’on nommait "pidgin", mode d’expression composé d’un vocabulaire simplifié tiré des langues respectives de ses locuteurs.
La traite des fourrures s’appuyait donc sur un partenariat commercial égalitaire dans lequel il aurait été insensé pour les Européens de vouloir soumettre à l’esclavage leurs hôtes, déjà désireux de marchander. De fait, si la couronne française souhaitait prendre pied en Amérique du Nord, il en allait de son intérêt stratégique primordial de cultiver de bonnes relations avec les premiers habitants de cette vaste contrée nordique.
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Crédit d’illustration : North Wind Picture Archives