26/12/2019
La réaction du Crif sur l’affaire Sarah Halimi et la décision de la juge.
- : Lettre ouverte du Président du Crif Francis Kalifat à Madame la Procureure générale près la Cour d'appel de Paris
Paris, le 21 décembre 2019
"Madame la Procureure Générale,
Les réquisitions de votre parquet dans le dossier Sarah Halimi me laissent sans voix. Comment le Parquet général peut-il être en contradiction avec le Procureur de Paris alors que tout au long de la procédure vous paraissiez en total accord avec lui ?
Comment, alors que toutes les expertises s’accordent pour ne reconnaître aucun antécédent psychiatrique au présumé coupable, et qu’il ne souffre pas plus aujourd’hui d’un quelconque trouble, comment alors que les trois expertises concluent à "une bouffée délirante aigüe causée par la consommation massive volontaire de cannabis", comment votre Parquet peut-il prendre des réquisitions concluant à l’abolition totale du discernement du présumé coupable ?
Votre Parquet souhaite-t'il installer une nouvelle jurisprudence dans notre pays qui ferait du cannabis un facteur excusant lorsqu’il s’agit d’un meurtre antisémite alors qu’il est un facteur aggravant pour tous les autres délits ?
Peut être, mais je ne peux me résoudre à le croire, votre Parquet a-t'il voulu éviter qu’à travers le procès de l’assassin de Sarah Halimi puisse aussi se tenir le procès de l’antisémitisme islamiste qui tue en France ?
Le bon réquisitoire n’aurait-il pas été de laisser le soin à une cour d’assises et à un jury populaire de trancher ce débat d’experts psychiatriques?
N'y aurait-il dans notre pays que du droit et pas de justice ?
Voilà madame la Procureure Générale les questions qui me hantent dans ce dossier.
Sachez, Madame la Procureure Générale qu’au delà de ma propre incompréhension ce sont tous les Français Juifs qui sont plongés dans un état de consternation collective et qui désormais savent que l’on peut dans notre pays, torturer et tuer des juifs de sang-froid sans pour autant être jugé. C’est ne pas retenir les leçons de l’Histoire que d’y consentir.
Mon dernier mot sera pour les enfants et la famille de Sarah Halimi qui se voient, par cette décision, privés du procès de l’assassin de leur mère, indispensable pour achever leur travail de deuil et pour retrouver la sérénité à laquelle ils ont droit.
Je vous prie de croire, Madame la Procureure générale, à l’expression de mes salutations interrogatives."